En visite à Gao, le 6 novembre dernier, Florence Parly, la ministre française des Armées a précisé l’idée d’un déploiement de forces spéciales pour épauler les unités locales et les militaires de Barkhane dans leur mission : « C’est pourquoi nous avons décidé de créer une unité de forces spéciales européenne.
Dès 2020, les forces spéciales françaises aux côtés des forces spéciales de nos partenaires européens seront déployées au Mali pour transmettre leur savoir-faire d’exception aux militaires maliens. Et je vous annonce aujourd’hui que cette unité de forces spéciales européennes se nommera Takuba, qui signifie « sabre » en tamachek. Ce sera le sabre qui armera les forces armées maliennes sur le chemin de l’autonomie et de la résilience. La force Takuba complète Barkhane et dessine le nouveau visage de la lutte contre le terrorisme au Sahel. Tout en poursuivant notre combat contre les groupes terroristes, nous concentrons nos efforts vers la montée en puissance de nos forces partenaires. »
Ainsi, en fait d’une nouvelle opération, comme cela avait été reçu par l’opinion nationale, il s’agit d’une nouvelle mission de formation des militaires maliens. Sous réserve que les contours de cette mission ne sont pas encore clairement élucidés, il faut beaucoup plus que des programmes de formation aux forces maliennes, surtout lorsqu’ils réservent la part léonine au respect des droits de terroristes, au détriment d’un engagement franc. Les revers subis par les FAMa à Dioura, à Boulkessy et plus récemment à Indelimane trahissent le capotage desdits programmes.
Est-ce pour cela que l’annonce de ‘’Takuba’’ a été accueillie avec circonspection, si ce n’est avec ironie de la part de cet internaute qui par le truchement d’un jeu de mots substitue à ‘’Takuba’’ ‘’Takamba’’ qui n’est rien d’autre qu’une musique et danse populaire en milieu sonrhaï, nonobstant une condition sécuritaire désastreuse ?
Une certitude par contre : il faut se convaincre une fois pour toutes que la guerre contre les terroristes au Sahel ne sera jamais gagnée sans la Force conjointe du G5 Sahel. Ce n’est pas une prophétie de mauvais augure ; les faits sont là pour l’établir.
Lors de l’opération de reconquête du Nord, en 2012, la suprématie dans les airs de l’aviation française n’a jamais suffi à mettre en déroute les jihadistes. Il a fallu des opérations au sol. Pour cela, les éléments de Serval ont eu besoin de l’Armée malienne avec qui elle a combattu jusqu’à Gao où ils lui ont faussé compagnie pour foncer sur Kidal.
À Kidal, les troupes de Serval ont appelé en renfort des rebelles pour la poursuite des opérations de ratissage. D’ailleurs, c’est face aux récriminations sur cette alliance jugée factueuse, que Jean-Yves Le Drian avait gaillardement assumé, le mardi 22 janvier 2013, sur l’antenne de FRANCE 24 : «Je le dis pour aujourd’hui, mais je le dis aussi pour demain. Les Touaregs, sauf ceux qui se sont laissés embrigader par des groupes terroristes que nous condamnons totalement (…) sont nos amis».
Outre l’amitié politique, l’alliance avec les Touareg avait des raisons objectives lorsqu’interrogé par FRANCE 24, Moussa Ag Assarid décline : «notre rôle pourrait être principal. Par notre connaissance du terrain et des populations, nous sommes plus efficaces que la force de la CEDEAO».
Autant dire que le Nord et le Centre peuvent être le point de convergence de toutes forces spéciales du monde que la guerre ne sera jamais gagnée. La mise à l’encan de la sécurité ne suscitera jamais plus offrant que les États du Sahel eux-mêmes. Les partenaires du Mali le savent, mais continuent à chipoter.
Mais, problème : La FC G5 Sahel a besoin d’importants moyens financiers et elle en manque cruellement. Le G5 Sahel cherche toujours les 2,4 milliards d’euros de promesses de dons de ses partenaires pour financer son premier programme d’investissement prioritaire 2019-2021. C’est pourquoi Maman Sidikou, secrétaire permanent du G5, demande un engagement clair, au cours d’une réunion de relance des requêtes tenue à Nouakchott, en février dernier.
« Il y a eu beaucoup de promesses. Nous avons eu une grande réunion à Bruxelles en février 2018 concernant la force conjointe. Les choses ne se sont pas passées comme on l’aurait souhaité, les financements ne sont pas arrivés assez rapidement pour que notre force conjointe ait les équipements qu’il faut à temps pour la bataille », a-t-il interpellé.
Le Secrétaire général de l’ONU, dans le Rapport du 1er octobre dernier, fait écho à cette interpellation : ‘’la communauté internationale doit également soutenir la force conjointe par un financement durable et prévisible afin qu’elle devienne pleinement opérationnelle’’.
In fine, la clé de la réussite de la lutte antiterroriste tient de deux éléments : mettre les forces nationales au cœur du dispositif de combat et leur donner les moyens de leur mission. Il ne leur resterait alors que l’option de relever le défi de leur engagement. Parce que : ‘’la vie est un combat. On n’a pas le choix. On se bat ou on se barre’’, disait Maleck Bensafia, Fonctionnaire, Inspecteur du Budget (Algérie).
PAR BERTIN DAKOUO
Source: info-matin